Après que le « Protecteur Unifié » a démoli l’Etat libyen, avec au moins
40mille bombes larguées en plus de 10mille missions d’attaque, et fourni
des armes même à des groupes islamiques classés jusque hier comme de
dangereux terroristes, à Washington on se dit préoccupé que les armes
des dépôts gouvernementaux finissent « dans des mains erronées ». Le
Département d’Etat a donc couru aux abris, en envoyant en Libye des
escadrons de
contractors militaires qui, financés jusqu’à présent
avec 30 millions de dollars, devraient mettre «en état de sécurité »
l’arsenal libyen. Mais derrière la mission officielle, il y a
certainement celle de prendre tacitement le contrôle des bases
militaires libyennes. Malgré l’engagement proclamé de ne pas envoyer de
«
boots on the ground », sur le terrain en Libye opèrent depuis
pas mal de temps des agents secrets et des forces spéciales des
Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Italie, Qatar et autres, qui ont
guidé les attaques aériennes et dirigé les opérations terrestres. Leur
mission, maintenant, est d’assurer que la Libye « pacifiée » reste sous
le contrôle des puissances qui sont allées la « libérer ».
Le 14 octobre, le jour même où le Département d’Etat faisait connaître l’envoi de
contractors en Libye, le président Obama annonçait l’envoi de forces spéciales en
Afrique centrale : au début, une centaine de militaires. Leur tâche
officielle est celle de « conseillers » des forces armées locales,
engagées contre l’ « Armée de résistance du Seigneur ». Opération
financée par le Département d’Etat avec, jusqu’à présent, 40
millions de dollars. La mission réelle de ces corps d’élite, envoyés
par Washington, est de créer un réseau de contrôle militaire de l’aire
comprenant Ouganda, Sud Soudan, Burundi, République centrafricaine et
République démocratique du Congo. Et pendant que les Etats-Unis envoient
leurs propres forces en Ouganda et au Burundi, officiellement pour les
protéger des atrocités commises par l’ « Armée du Seigneur » qui se dit
inspirée par le mysticisme chrétien, Ouganda et Burundi se battent en
Somalie pour le compte des Etats-Unis, avec des milliers de soldats,
contre le groupe islamiste al-Shabab. Ces soldats sont soutenus par le
Pentagone qui, en juin dernier, leur a fourni pour 45 millions de
dollars d’armes, y compris des petits drones et des viseurs nocturnes.
Le 16 octobre, deux jours après l’annonce de l’opération étasunienne en
Afrique centrale, le Kenya a envoyé des troupes en Somalie. Une
initiative officiellement motivée par la nécessité de se protéger des
bandits et pirates somaliens ; en réalité promue par les Etats-Unis pour
leurs propres objectifs stratégiques, après l’échec de l’intervention
militaire éthiopienne, elle aussi promue par les Etats-Unis. Et en
Somalie, où le « gouvernement » soutenu par Washington contrôle à peine
un quartier de Mogadiscio, la Cia est à l’œuvre depuis longtemps, avec
des commandos locaux dûment entraînés et armés et des
contractors de compagnies militaires privées. Les Etats-Unis visent donc le
contrôle militaire des aires stratégiques du continent : la Libye, à
l’intersection entre Méditerranée, Afrique et Moyen-Orient ; l’Afrique
orientale et centrale, à cheval sur l’Océan Indien et l’Atlantique. Le
jeu, apparemment compliqué, devient clair en regardant une carte
géographique. Mieux encore sur un atlas historique, pour voir comment le
néo-colonialisme ressemble de façon impressionnante au vieux
colonialisme.
Edition de mardi 19 octobre 2011 de
il manifestohttp://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20111018/manip2pg/14/manip2pz/311792/
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio