Après avoir refusé de participer à la guerre en Libye, le gouvernement
allemand se ravise : l’Allemagne - a annoncé le ministre des affaires
étrangères Westerwelle- est prête à envoyer des troupes pour « fournir
de l’aide humanitaire aux civils libyens ». Elles feront partie de
l’opération « Eufor Libya » (Force de l’Union européenne en Libye), que
l’Ue s’apprête à lancer. L’objectif officiel est de « soutenir les
agences humanitaires dans leurs activités ». Les groupes de combat de
l’Ue s’en occuperont, en habits de « coopérants ».
Ce sont des groupes militaires de la dimension d’un bataillon, chacun de
1.500 soldats, hautement entraînés pour être projetés avec un préavis de
15 jours dans des « zones de crise lointaines, comme celles des failing
states (Etats en faillite) ». Les groupes de bataille, employés
généralement « mais non exclusivement » sur mandat de l’ONU, conduisent
des « opérations de combat dans un environnement extrêmement hostile
(désert, jungle, etc.) ». Leur mission est de « préparer le terrain à de
plus grandes forces de peacekeeping »
Le quartier général de l’opération « Eufor Libya », dont dépendent les
groupes de bataille de l’Ue, est localisé à Rome, sur l’aéroport «
Francesco Baracca » de Centocelle. Commandé par le contre-amiral Claudio
Gaudiosi de l’état-major italien. Il fait partie du Commandement
opérationnel du sommet inter forces (Coi), qui planifie et dirige les
opérations militaires à l’étranger, ainsi que les manœuvres interforces
et multinationales dans le cadre de l’OTAN. Le «mérite» de la
constitution de la Coi, par la loi n. 25 du 18 février 1977, revient au
premier gouvernement Prodi (centre-gauche NdT) qui lança la
restructuration des sommets des forces armées, en augmentant les
pouvoirs du chef d’état-major concernant les opérations militaires à
l’étranger. Juste à temps pour la guerre contre la Yougoslavie et les
suivantes en Afghanistan, Irak et Libye, auxquelles ont participé les
forces militaires italiennes. Le Coi a maintenant une ultérieure
satisfaction : l’attribution au contre-amiral Gaudiosi du commandement
des groupes de bataille de l’Ue pour l’opération « Eufor Libya ».
Etant donné que les USA ne sont pas disponibles pour envoyer de troupes en Libye, entrent
en jeu les groupes de la bataille de l’Ue, pour lesquels se prépare le
premier véritable test sur le terrain. Tandis que les plus grandes
puissances européennes, mais pas l’Allemagne, participent
individuellement à l’opération « Protecteur unifié » sous le
commandement de l’OTAN (c’est-à-dire étasunien), en attaquant depuis le
ciel et la mer les forces gouvernementales libyennes afin d’ouvrir la
voie aux rebelles, l’Union européenne en tant que telle s’apprête à
débarquer des troupes militaires en Libye. Formellement pour fournir de
l’aide humanitaire aux civils, en réalité pour soutenir les rebelles et
préparer le terrain à des forces plus grandes de « peacekeeping » sous
drapeau européen, OTAN ou autre. Leur premier objectif sera d’occuper
les zones clé de l’industrie énergétique libyenne, formellement
pour les protéger des forces de Kadhafi ou pour garantir un
cessez-le-feu, en réalité pour couper Tripoli de sa source fondamentale de revenus.
Deux scénarios se dessinent ainsi : ou une Libye « balkanisée », divisée en
deux ou plusieurs états ethnico-tribaux, avec les plus grosses réserves énergétiques
aux mains d’un gouvernement ami disposé à toute concession, ou une
situation de type irako-afghan, avec le renversement de Kadhafi et son
remplacement par un administrateur des intérêts coloniaux des Etats-Unis
et de l’Europe unie.
Edition de mardi 12 avril 2011 de il manifesto.
http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20110412/09/manip2pz/301147/
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio