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 L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes

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مُساهمةموضوع: L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes   L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes Icon_minitimeالأربعاء 23 مارس 2011 - 2:40

L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes
par Pr Chems Eddine Chitour

L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes 23858

« Un jour, deux bandits sont entrés dans le palais d’Été. L’un a pillé,
l’autre a incendié. L’un des deux vainqueurs a empli ses poches, ce que
voyant, l’autre a empli ses coffres; et l’on est revenu en Europe, bras
dessus, bras dessous, en riant. Telle est l’histoire des deux bandits.
Nous, Européens, nous sommes les civilisés, et pour nous, les Chinois
sont les barbares. Voilà ce que la civilisation a fait à la barbarie.
Devant l’histoire, l’un des deux bandits s’appellera la France, l’autre
s’appellera l’Angleterre.»


Victor Hugo (Lettre au capitaine Butler)


L'irakisation de la Lybie : Le Monde arabe en miettes Libye_carte1

17 mars, une date à retenir. Ce jour-là, un pays arabe, en l’occurrence,
la Libye, est entré dans l’engrenage de la partition, lâché par les
siens, il fait l’objet d’une curée savamment préparée depuis plusieurs
mois pour s’emparer de richesses pétrolières (2 à 3 fois celles des
Etats-Unis). Comme en Irak, le scénario est bien rôdé, il s’agit cette
fois, de protéger les Libyens contre El Gueddafi. Après l’Irak, après la
Somalie, après le Soudan voici le tour de la Libye. Nous ne devons nous
en prendre qu’à nous-mêmes car si l’impérialisme vient au secours des
dissidents qu’il a créés c’est que les potentats arabes n’ont jamais
voulu de l’alternance. L’Islam a bon dos d’être défendu par des bras
cassés qui en fond de commerce pour se maintenir au pouvoir se réfugiant dans la fatalité en acceptant leur sort sans se battre et sans aller vers la science et la technologie.


Pour l’histoire, la France et la perfide Albion (l’Angleterre) sont de
toutes les expéditions guerrières contre les Etats faibles. En 1856, ils
attaquent l’Empire ottoman; prétexte: protéger les minorités
chrétiennes. Ensuite, en octobre 1860, ce fut l’attaque de la Chine
décrite d’une façon saisissante par Victor Hugo: 1917, le dépeçage de
l’Empire ottoman par les sinistres accords Sykes-Picot. En 1956 la
France attaque avec son vieux complice de toujours, l’Angleterre, et
Israël, l’Egypte. En 1991 elle est dans la coalition contre l’Irak. En
2008, elle est en Afghanistan. Une seule fois elle s’était opposée à
l’aventure irakienne de Bush, en vain. La France du président Sarkozy
prend la tête d’une croisade - dixit El Gueddafi - contre un potentat
arabe, El Gueddafi, au pouvoir depuis 42 ans.


Les réticences du Monde


«Il faut savoir que mis à part les pays occidentaux (Etats-Unis,
Grande-Bretagne, France,) les 90% de la planète ne sont pas d’accord
avec les frappes. Pour l’Union africaine, la coalition
américano-européenne a mis à exécution sa déclaration de guerre à la
Libye, en effectuant plusieurs frappes maritimes et aériennes sur le
pays, faisant une cinquantaine de morts et près de 200 blessés parmi la
population, en application de la résolution 1973 de l’ONU recommandant
«des mesures de protection des civils libyens». La France, qui fait de
cette offensive une affaire personnelle, appuyée par les Etats-Unis et
la Grande- Bretagne, a fait entériner samedi à Paris cette intervention
lors d’une réunion de l’Union européenne et de la Ligue arabe, au mépris
de la position de l’Union africaine qui entend privilégier la voie
diplomatique et appelle à l’arrêt immédiat des hostilités. En effet, la
coalition américano- européenne semble avoir décidé de prendre de court
le panel africain sur la Libye, formé par l’Union africaine et qui se
réunissait ce même samedi à Nouakchott, capitale mauritanienne, pour
faciliter un dialogue inclusif entre les différentes parties, sur les
réformes nécessaires.»(1)


De même, rapporte le Nouvel Obs, «l’intervention militaire lancée samedi
19 mars en Libye est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté
internationale. Les Brics prudents, les grandes puissances émergentes se
sont ainsi fait remarquer par leur refus de toute ingérence. La Russie
appelle, dimanche, la coalition internationale à cesser de recourir à la
force de manière ‘’non-sélective’’ et de faire ainsi des victimes
civiles. La résolution de l’ONU a été ‘’adoptée à la hâte’’, avait
regretté plus tôt Moscou. ‘’Il faut rapidement arrêter les effusions de
sang et que les Libyens entament le dialogue’’, a déclaré samedi le
porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères.»(2) «Pékin
‘’exprime ses regrets concernant les attaques militaires contre la
Libye’’, indique un communiqué. ‘’Nous espérons que la Libye peut
rétablir la stabilité aussi vite que possible et éviter de nouvelles
victimes civiles liées à l’escalade d’un conflit armé’’. Et l’Inde qui
‘’regrette’’ dimanche 20 mars les frappes aériennes de la coalition, et
‘’considère avec une grande inquiétude la poursuite de la violence, des
conflits et la détérioration de la situation humanitaire en Libye’’.
‘’Il n’y a aucun doute que les intérêts représentent le motif essentiel
de cette action militaire, le pétrole en est le carburant’’, écrit le
quotidien qui dénonce les ‘’aspects politiques et coloniaux’’ de
l’intervention. Au Vénézuéla, Hugo Chavez s’est montré particulièrement
offensif jugeant ‘’irresponsable’’ l’intervention armée. La Turquie
demande un réexamen des plans que l’Otan prépare depuis des semaines
pour la Libye, jugeant que l’intervention armée de la coalition change
la donne, rapportent des diplomates de l’alliance. Même La
Haut-Représentant de l’Union pour les Affaires étrangères, Catherine
Ashton, a refusé de reconnaître le CNT (Conseil national de transition)
et s’oppose à la zone d’exclusion aérienne.


Pour l’universitaire allemande, Annette Kaiser, l’Allemagne est réfractaire
aux politiques d’interventions militaires communes. Et elle s’est
prononcée contre une opération en Libye et contre l’instauration d’une
zone d’exclusion aérienne. On ne peut jamais être certain de ne pas
déclencher une guerre civile. (...) On se pose aussi des questions sur
la vraie raison de l’intervention en Libye. A-t-elle vraiment lieu au
nom des droits de l’homme? Dans ce cas, pourquoi choisir la Libye? Et
pas la Côte d’Ivoire? Le Zimbabwe? Il est de notoriété publique que les
Etats ne mettent en branle leur puissance militaire que quand leurs
intérêts directs sont en jeu...Ce n’est pas les gentils d’un côté et les
méchants de l’autre...Depuis l’Allemagne, nous estimons que Sarkozy
règle aussi des problèmes de politique intérieure avec la crise
libyenne. Son taux de popularité catastrophique dans les sondages, le
jeu trouble de la France lors des révolutions tunisienne et
égyptienne... La Libye, c’est aussi une belle occasion d’apparaître
comme un défenseur des droits de l’homme».(3)


Même en France, Jean-Marie Le Pen a fermement critiqué la position
française, soupçonnant que derrière les motifs humanitaires invoqués se
cachent des motivations moins avouables: le contrôle du pétrole libyen.
Il a aussi critiqué le rôle joué ces derniers jours par Bernard-Henri
Lévy, devenu une sorte de ministre des Affaires étrangères bis.


L’attaque de la Libye était planifiée depuis plusieurs mois


Pour Gilles Munier « tout était préparé à l’avance. Sarkozy voulait sa
guerre, il l’a - au forceps - grâce à Bernard-Henri Lévy, Alain Juppé,
et au gouvernement conservateur anglais. Un exercice militaire de grande
ampleur franco-britannique, planifié en trois mois - au lieu de six
habituellement - va lui faciliter la tâche. Il est prêt pour
attaquer«Southland»...entre le 21 et le 25 mars, un pays affublé d’un
«régime dictatorial» au sud de la Méditerranée. Nom de code de
l’opération «Southern Mistral», et celui de la première frappe: ‘’Desert
Storm’’! Elle est aujourd’hui programmée pour de vrai, quel que soit le
nom qui va lui être attribué pour donner le change. Pour attaquer la
Libye, donc, il ne manquait que l’habillage diplomatique de
l’intervention occidentale, c’est-à-dire la caution du Conseil de
sécurité de l’ONU et la constitution d’une coalition comprenant «nos
bons vieux amis arabes». C’est fait, en urgence. On s’en souvient:
«Desert Storm - Tempête du désert» était le nom choisi en janvier 1991
par le Pentagone, de l’attaque de l’Irak ordonnée par George Bush
(père) ».(5)


« L’opération avait été précédée par un exercice quasi identique à ‘’Southland’’,
dirigé quelques mois plus tôt au Koweït, par le général Norman
Schwarzkopf. (...) Le colonel El Gueddafi n’est pas un ange, mais on a
l’impression d’assister à un copier-coller de la campagne de
diabolisation du président Saddam Hussein: le Guide libyen «bombarde son
propre peuple» (...) Détail piquant: le Qatar, les Emirats arabes unis
participent dans la guerre pour protéger le peuple. Les mêmes qui
participent du côté de l’Arabie Saoudite dans l’oppression du peuple
bahreïni. Bahrein, Yemen, Libye: un seul combat. Les tyrans du monde
réunis contre les peuples en lutte.»(4) «Sur le plan régional, les
choses risquent de se compliquer. Si les pétromonarchies du Golfe ne
cachent pas leur soutien à l’interventionnisme occidental, la Turquie et
l’Algérie, qui partagent une commune méfiance à l’égard de ce retour
fracassant de la France sur la scène internationale et maghrébine, se
trouvent confrontées à un défi stratégique et diplomatique majeur. Si la
Turquie doit faire face à l’hostilité endémique de la France de
Sarkozy, violemment opposée à l’entrée de la Turquie au sein de l’UE,
l’Algérie sait qu’une intervention française réussie en Libye
constituera une menace directe à sa sécurité nationale dans la région du
Sahel.»(5)


Mohamed Tahar Bensaâda comparant les diplomaties turque et arabes décrit la
première comme une réussite face à la débâcle de la seconde.


« Les Occidentaux exultent. (...) La complexité de la crise libyenne,
dont les derniers développements militaires sur le terrain laissent
présager un enlisement propice à toutes les éventualités, explique les
tergiversations dans le camp occidental. Si on laisse de côté les
arguments idéologiques pseudo-humanitaires servis dans les médias
occidentaux et arabe pour justifier une intervention occidentale, force
est de constater que l’interventionnisme occidental, relayé
anticipativement par la Ligue arabe, obéit à une grossière logique
d’intérêts. Au Bahreïn, où un soulèvement pacifique, qui dure depuis
plusieurs semaines, en vue de réclamer une «monarchie constitutionnelle»
et des réformes sociales, a été et continue d’être réprimé dans le sang
par un régime féodal et autocratique, ni les Américains, ni leurs
alliés européens et arabes n’ont décelé de «crimes contre l’humanité»
appelant un «devoir d’ingérence humanitaire»... (...)Heureusement, à
côté de cette diplomatie arabe pusillanime, une puissance musulmane est
en train de montrer une autre voie, alliant réalisme et principes. Dans
un entretien accordé à la chaine satellitaire Al Arabiya, le Premier
ministre turc, Tayeb Erdogan, a rappelé quelques principes qui devraient
guider toute diplomatie arabe qui se respecte ». (6)


« Avant toute chose, le leader turc a rappelé l’exigence de prendre en
considération le désir de changement profond exprimé par les peuples
arabes, non sans préciser que ce changement connaîtra des formes et des
rythmes propres à chaque situation nationale. Il a réaffirmé la position
de la Turquie qui s’oppose à toute intervention étrangère. A cet égard,
Erdogan rappelle qu’il a eu un entretien téléphonique avec El Gueddafi,
et qu’il lui aurait conseillé de proposer une personnalité
consensuelle, en vue de superviser une période de transition préalable à
l’instauration d’un régime constitutionnel. (...) Mais si les
développements militaires sur le terrain continuent à aller dans le sens
d’un enlisement durable et dangereux pour la sécurité et la stabilité
de la région, il n’est pas dit que la seule solution qui s’offre aux
Américains et à leurs


une telle éventualité pouvait voir le jour, ce n’est pas seulement la
diplomatie turque qui en sortirait renforcée, mais également la
diplomatie arabe, qui pourrait ainsi se libérer de la tutelle
réactionnaire des pétromonarchies du Golfe.»(6)


Ce qui se passera ensuite


Felicity Arbuthnot décrit d’une façon saisissante le devenir de la Libye une fois normalisée. Ecoutons-la:

« Le bombardement de la Libye va commencer le jour - ou à un jour près -
du huitième anniversaire du début de la destruction de l’Irak, Il y aura
de nombreuses «erreurs tragiques» et autres «dommages collatéraux» de
mères, pères, enfants, bébés, grands-parents, écoles pour les sourds et
muets, etc. etc. Les infrastructures vont être détruites. L’embargo
restera en place; et rendra la reconstruction impossible. L’Angleterre,
la France et les USA décideront que le pays a besoin d’être «stabilisé»,
qu’il faut «l’aider à reconstruire». Ils arriveront et prendront la
direction des installations et des champs de pétrole; au début, les
Libyens seront un problème accessoire puis ils deviendront vite
«l’ennemi» des «insurgés», on leur tirera dessus, ils seront
emprisonnés, torturés, victimes de toutes sortes d’abus -et un
«gouvernement» fantoche, ami des USA, sera mis en place. Les
envahisseurs accorderont à leurs firmes des contrats pour la
reconstruction, l’argent -qui sera sans doute prélevé sans compter sur
les actifs gelés- disparaîtra et le pays restera largement en ruines.
(...) Que dire de cet «effroi et stupeur» qui attend la Libye? Honte sur
la France, honte sur l’Angleterre, les USA et sur l’ONU qui prétend:
«.... protéger les générations suivantes du fléau de la guerre». Les
noms de ces pays et de l’ONU seront inscrits avec le sang de leurs
victimes: chaque corps brisé, chaque enfant estropié ou réduit en
bouillie, chaque veuve, veuf ou orphelin, sur chacune de leurs tombes.
(...) Avec le temps, nous apprendrons qui a intrigué, soudoyé,
déstabilisé et sans doute que peu de gens seront surpris de ce qu’ils
découvriront. Mais il sera trop tard, la Libye sera depuis longtemps
détruite et sa population éperdue se sera enfuie ou aura été déplacée.
Quand on a affaire aux «libérateurs» il faut faire attention à ce qu’on
dit. Dans six mois à peu près, la plupart des Libyens, regretteront
amèrement les 40 dernières années de pouvoir quelles que furent ses
imperfections.»(7)

Tout est dit, l’irakisation, prélude à la partition, est inéluctable.
Pourtant, si on mobilise l’intelligence. Le pétrole arabe doit
appartenir à la jeunesse arabe, nous avons une occasion unique dans
l’histoire de faire revivre notre civilisation en faisant notre mea
culpa et en allant à marche forcée vers le progrès comme le fait
l’Indonésie, la Turquie et surtout l’Iran qui est du point de vue
scientifique un exemple à suivre. Débarrassons-nous des scories du
mimétisme, restons éveillés, ce qui arrive à la Libye risque de nous
arriver,(8) prenons les bonnes décisions avant que cela ne soit trop tard.


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